Histoire du chapeau Panama
Exporté depuis plus de 150 ans, le chapeau Panama a fait le tour du monde sous cette appellation. Il est pourtant équatorien.
Une paille nommée Toquillas « Cardulovica palmata »
En 1534, venant d’Amérique centrale, une flotte espagnole débarque à Bahia de Cadaquez. Ces troupes venaient à la rescousse des conquistadors qui étaient confrontés aux guerriers du propre frère de l’empereur inca : Atahualpa.
Lors de leur remontée vers la Sierra, les espagnols traversent les villages du Jipijapa et Montecristi, en Equateur. Le père José Maria Cobos fut alors surpris par les étranges coiffes que portent les habitants pour se protéger du soleil. Leur finesse et leur découpe rappellent les ailes des chauves souris, et les espagnols pensent tout simplement qu’elles sont faites de la peau de cet animal.
Origine du chapeau panama
Il s’agit en fait d’une fibre végétale appelée « Pajamocora », extraite d’un palmier qui ne pousse que dans ce pays. Il fallut attendre 1630 pour que Francisco Delgado, installé dans la région de Manabi, découvre l’habileté des natifs de la région à travailler cette fibre.Il découvre également les nombreuses qualités de cette fibre, sa blancheur exceptionnelle, sa finesse et sa souplesse qui permettent de rouler les chapeaux dans sa poche, puis de les sortir sans qu’ils ne soient froissés.
Delgado les nomme « Tocas », toque en espagnol ; très vite le diminutif de « toquillas » apparait et cette appellation remplace définitivement celle de Mocora.
Les chapeaux de paille « Toquillas »étaient nés mais il fallut attendre près de deux siècles pour qu’ils deviennent les « Panama hats»
Au milieu du XIX° siècle, les chapeaux de paille Toquillas s’étaient installés dans la tradition locale. La région de Guayaquil et la province de Manabi cultivèrent le palmier dont la fibre était la matière première des Toquillas et de nombreuses familles se spécialisaient dans la confection.
Les chapeaux étaient portés un peu partout du Pérou à l’Amérique centrale, mais leur fabrication restait artisanale et ne pouvait pour cette raison connaitre un réel essor.
Pourtant en 1830, lors de l’éclatement de la grande Colombie, la garnison des soldats républicains de Cuenca était coiffés de ce chapeau. Cette première utilisation ne passe pas inaperçue.
En 1835 la première industrie vit le jour à Cuenca : 3000 chapeaux a l’année.En 1881, les Etats Unis entreprenaient le percement du canal de Panama et des milliers d’ouvriers originaires de différents pays y furent affectés. Très vite, les services vétérinaires rendirent obligatoires le port du chapeau pour se protéger du soleil ; légers, confortables, et pratiques, les Toquillas firent l’unanimité. Adoptés par tous, les « Toquillas » équatoriens se négociaient a prix d’or : autour des 100$ l’unité. Le Panama a cependant acquis ses lettres de noblesse grâce au président Roosevelt, qui l’adopta lors d’une visite du chantier du Canal en 1906, popularisant ainsi l’appellation « Panama hat ».
Les chapeaux équatoriens allaient faire le tour du monde... On les retrouve lors de la première révolution cubaine (1885), puis pendant la guerre des USA contre l’Espagne (1898). Le seul chantier du Canal a consommé plus de 100 000 de ces chapeaux...
En 1925, 5 ans après l’inauguration du Canal, les fabriques de Cuenca, qui employaient plus de 50 000 personnes, produisaient plus de 1.500.000 chapeaux par an, tous destinés a l’exportation. Jusqu’en 1972, date des premières exportations de pétrole, les chapeaux étaient le premier produit manufacturé d’exportation de l’équateur.
Atteignant en 1977 le chiffre record de 5 millions, le chapeau était vendu dans plus de 120 pays. Depuis, le chapeau Panama a eu l’honneur de coiffer de nombreuses têtes célèbres du monde du spectacle ou de la politique ainsi que d’innombrables anonymes. Jusqu'à aujourd’hui où ses qualités tels que la légèreté et la praticité ne sont plus à démontrer. Pourtant de nos jours, une véritable crise affecte cette industrie. Les Panamas régis par un label de qualité sont considérés comme produits de luxes à l’exportation vers les pays riche et sont donc taxés en conséquence. En revanche, les chapeaux de basse qualité, produis en Colombie et au Venezuela, circulent librement.
De nombreuses initiatives privées sont prises depuis quelque temps pour sauvegarder cette production. De plus, entre la production de la fibre et la confection des chapeaux, plusieurs milliers d’emplois sont assurés.
Enfin, même s’ils portent le nom d’un autre pays, le chapeau de Panama est le seul produit qui dans le monde puisse s’identifier à l’équateur.
Un aspect du patrimoine culturel qu’il serait bon de préserver